La visite d’un infirmier pour les personnes testées positives au Covid-19


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Cet article a été publié le par Brigitte Femenia et a été consulté 283 fois.

Catégorie : actualité

Depuis le 21 janvier, les enquêteurs sanitaires en charge du contact tracing proposent systématiquement la visite d’un infirmier libéral aux personnes déclarées positives au Covid-19. Cette rencontre permet d’aider le patient à organiser son isolement, de tester les autres membres du foyer, de proposer un accompagnement, d’informer le médecin traitant et de rappeler les messages de santé publique. Vingt-quatre infirmiers participent au dispositif.

Il est 19 heures ce mercredi soir. Après sa journée de visites chez ses patients et avant sa garde de nuit chez les sapeurs-pompiers de Cayenne, Delphine Pérus, infirmière libérale de l’Île-de-Cayenne, va rendre visite à deux jeunes femmes déclarées positives au Covid-19 lundi. L’Assurance maladie propose depuis deux semaines ce service, lors des appels de contact tracing, à tous les personnes nouvellement déclarées porteuses du virus. Le but est de les aider dans leur isolement à domicile et de détecter d’éventuelles difficultés sociales ou problématiques de santé autres.

La première visite, ce soir-là, est pour une secrétaire médicale de 28 ans, sur la ZAC Hibiscus, à Cayenne. Elle accueille l’infirmière sur son balcon, au premier étage d’un des récents immeubles du quartier. Son compagnon a été testé positif le même jour. Leur petite fille, en revanche, n’a pas attrapé le virus. Elle est donc gardée par sa grand-mère. Tout se passe bien pour cette professionnelle de santé déjà sensibilisée à la maladie. L’appartement est bien aéré, son enfant est gardée, la famille dépose les courses, son conjoint télétravaille. Seule la perte de goût l’inquiète un peu, et sa fille qui demande tous les jours quand elle pourra rentrer à la maison. « Pour vous, toutes les conditions sont bonnes. Je n’ai pas grand-chose à faire pour vous », reconnaît Delphine Pérus. Elle s’assure toutefois que la jeune femme a bien tous les numéros de téléphone des services qui peuvent l’aider si besoin. « N’hésitez pas, même si votre demande vous paraît dérisoire. Vous pouvez aussi m’appeler, 24 heures/ 24. »

Ce n’est pas toujours le cas. « La deuxième personne que j’étais allée voir, la semaine dernière, c’était une catastrophe. C’était un squat où, avec la meilleure volonté du monde, il était impossible de s’isoler. Dans de telles conditions de promiscuité, il était impossible de respecter quoi que ce soit. J’ai signalé la situation pour qu’elle puisse bénéficier d’un isolement à l’hôtel. »

Autre situation, toujours la semaine dernière, dans le centre-ville de Cayenne. Une maison créole rénovée en appartement avec une cour intérieure et un logement au fond de la cour. C’est là que vivait la patiente. « Elle avait compris l’isolement. Elle s’était organisée avec ses enfants. Mais c’était elle qui faisait le ménage des parties communes et elle continuait de le faire. Et c’est aussi elle qui est venue m’ouvrir la porte de l’immeuble. Je lui ai donc donné quelques astuces pour éviter de transmettre le virus », se souvient Delphine Pérus.

Apporter son aide, sa connaissance de la maladie, c’est ce qui a motivé Delphine Pérus, quand l’Assurance maladie et l’Agence régionale de santé ont lancé un appel à volontaire pour réaliser ces visites à domicile chez les patients diagnostiqués positifs au Covid-19. « Je ne suis pas d’accord avec tout ce qui est mis en place mais je sais ce que je sais faire et ce que je peux apporter. »

Lors d'une rencontre avec l'ARS, Laurence Cauchard, médecin chef de la direction régionale du service médical, à la Caisse générale de sécurité sociale, se réjouissait que « de plus en plus d'infirmières sont volontaires. Les retours des premiers patients visités et des infirmières sont très positifs

- Le casse-tête de l'adresse

Delphine Perus nous avait prévenu, en découvrant l’adresse d’une des patientes à voir mercredi soir : être infirmière libérale en Guyane, c’est parfois aussi compliqué que soutenir une thèse de géographie. L’impasse où habite la patiente n’évoque rien ni à l’IDEL ni à l’auteur de ses lignes – qui cumulent à eux deux quarante années à arpenter l’Île-de-Cayenne. Mais le nom de l’impasse ne parle pas non plus à Mappy, ni à Waze, ni à Viamichelin, ni à Maps… en fait à pas grand-monde. « Ici, on a toujours dit qu’on habitait [il cite une grande rue de Cayenne], soupire un riverain, qui vit là depuis trente-six ans. La mairie nous a mis une pancarte il y a un an, avec le nom d’une personne qu’on ne connaît pas. »

Trouver l’impasse n’a pas été une mince affaire. Il s’agit désormais de trouver le n°6, alors que la nuit est tombée sur Cayenne depuis plus d’une heure. « Des numéros, il n’y en a jamais eu », poursuit le riverain. Le numéro de téléphone de la patiente, par un malencontreux concours de circonstances, n’est pas le bon. L’impasse ne compte que sept maisons et un petit immeuble, mais pas grand-monde dehors à cette heure-ci, pas de nom sur les boîtes aux lettres et peu de sonnettes. Un automobiliste ouvre le portail électrique de l’immeuble pour rentrer chez lui. Delphine Perus se faufile. L’automobiliste n’a jamais entendu le nom de la patiente. Toujours pas de nom sur les boîtes aux lettres, ni sur les boutons des interphones. Un locataire vient ouvrir à l’infirmière. Il n’a jamais entendu le nom de la patiente. Delphine Perus se lance alors dans un porte à porte effréné, à la recherche de sa patiente. A la sixième porte, deux étages plus haut, ce sera la bonne !

♦ Des visites pour conseiller, tester, accompagner…

Les visites à domicile d’infirmiers libéraux, réalisées depuis le 21 janvier en Guyane, sont l’un des principaux outils de la nouvelle stratégie « Tester, alerter, protéger ». Cette visite est « réalisée idéalement dans les vingt-quatre heures suivant l'appel », rappelait le Dr Cauchard, médecin chef à la direction régionale du service médical, à la Caisse générale de sécurité sociale (CGSS), lors d'une rencontre avec l'ARS. Au plus tard, elle est réalisée dans les 48 heures suivant l’annonce du résultat positif. Elle permet au professionnel de santé de :

  • Relayer les messages de santé publique, de bonne appropriation de la démarche, de l’importance de respecter l’isolement, des gestes barrière et des signes cliniques qui doivent alerter. Ceci afin d’aider les personnes à « réussir leur isolement » en leur prodiguant des conseils sanitaires et d’organisation de la vie quotidienne en particulier ;
  • Tester les personnes du foyer non testées ;
  • Identifier les personnes nécessitant un appui social à leur isolement pour réaliser le lien avec Yanacov lorsqu’un besoin est identifié ;
  • S'assurer qu'il n'y a pas de risque de gravité ;
  • Vérifier que le patient a bien récupéré ses masques ;
  • Informer systématiquement le médecin traitant de la réalisation de la visite.

Au cours de la première semaine, 31 patients ont demandé à recevoir cette visite.

En pratique, les enquêteurs sanitaires en charge du contact tracing proposent systématiquement aux personnes testées positives à la Covid un accompagnement sanitaire, matériel et psychologique à l’isolement. L’Assurance maladie transmet ensuite la liste des patients ayant accepté la visite au GCS Guyasis. Le Dr Gilles Thomas sollicite alors un infirmier pour réaliser les visites de son secteur géographique. Si le patient a l’habitude d’être suivi par un infirmier, il peut le signaler pour qu’il réalise cette visite. Actuellement, 24 infirmiers se sont portés volontaires sur ce dispositif pour l’ensemble de la Guyane, dont la très large majorité dans l’Île-de-Cayenne et, malheureusement, aucun dans le secteur des Savanes, entre Macouria et Iracoubo.

La Caisse générale de sécurité sociale (CGSS) recontactera le patient à J4 et à J7 après son test positif pour le suivi et la fin de son isolement.

Si la visite à domicile de l'infirmier n'est pas accepté ou si aucun infirmier ne peut la réaliser et en l'absence de médecin traitant, un suivi médical est assuré à J2 par Véyé mo santé (Île-de-Cayenne, Kourou et Savanes) ou le Centre Hospitalier de l'Ouest Guyanais (Saint-Laurent du Maroni et le littoral ouest). En cas de vulnérabilité sociale, il est proposé une visite à domicile par les équipes de YanaCov et Médecins du monde (Île-de-Cayenne), de la Croix-Rouge française (Kourou et Savanes) ou du Chog (Saint-Laurent du Maroni et littoral ouest). Dans les communes de l'intérieur, le suivi est assuré par les centres délocalisés de prévention et de soins (CDPS).

 

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