Les infirmières libérales désappointées face à la réforme de leur profession
Si les infirmières libérales et plus généralement toutes les infirmières se félicitent de l’annonce faite, il y a plusieurs mois, de réformer la profession infirmière, elles ressentent aujourd’hui une profonde déception voire une colère face à la tournure que prend cette réforme.
C’est ce qu’exprime le président du Syndicat National des infirmiers libéraux (SNIIL), John Pinte, à l’occasion d’une conférence de presse :
« Nous sommes à un moment charnière, voire crucial, pour le système de santé.…Nous avons l’impression que les choses bougent et, en même temps, on perçoit un mal-être au sein de la profession, une perte de sens. »
Les infirmières libérales connaissent en effet la nécessité de transformer le système de santé et d’adapter la profession aux évolutions prévisibles de ce dernier, notamment en termes de demandes de soins avec les évolutions démographiques déjà connues (vieillissement de la population). Jusque-là, de grandes idées directrices avaient pu réussir à donner l’apparence d’une volonté d’un véritable changement. Mais les infirmiers libéraux commencent désormais à s’inquiéter, en constatant comment il est complexe de passer de ces déclarations de principe à de véritables transformations de leur quotidien.
L’inquiétude des IDEL(s), une nouvelle menace pour l’avenir de la profession ?
Cette inquiétude peut même se transformer en exaspération, quand les infirmiers libéraux estiment que ces décisions sont prises sans un véritable plan global d’ensemble. Ainsi, si les professionnels concernés pouvaient se féliciter des expérimentations visant à permettre aux IDEL(s) de rédiger les certificats de décembre dès septembre 2023, il aura fallu attendre novembre 2023 pour que les décrets soient publiés et rendent ces expérimentations réellement déployables. Ces hésitations, ces erreurs, se font également sentir dans les travaux devant conduire à la refonte du métier d’infirmier. John Pinte le déplore amèrement en soulignant que des efforts sont faits pour « régulariser les problèmes actuels. Mais il n’y a pas d’anticipation, pas d’ambition pour l’avenir ». Et ce manque de projection pose un véritable problème d’autant plus qu’il s’agissait de transformer en profondeur un système jugé à bout de souffle. Le président du SNIIL a expliqué, au cours de cette conférence, que de nombreux cabinets infirmiers étaient inquiets pour leur avenir, et que le syndicat avait enregistré une augmentation (légère certes mais bien réelle) du nombre de départs anticipés des IDEL(s) en 2022. Il ne faudrait pas que le phénomène persiste et encore moins s’amplifie, à un moment où le gouvernement affiche son ambition de recruter de nombreuses infirmières hospitalières d’une part et inciter à l’installation de nouvelles IDEL(s) d’autre part.
« Le contexte est à la morosité complète, et ce n’est pas propre à notre profession. »
Car à ces inquiétudes quant à l’avenir même de la profession viennent s’ajouter des problèmes économiques incontestables. En effet, le gel des lettres clés depuis 2009 n’empêche pas que les infirmiers libéraux sont confrontés, comme tout un chacun, à ce contexte inflationniste. Ainsi, si l’activité des IDEL(s) a stagné en 2022 selon le président du SNIIL, « Leurs bénéfices ont baissé de 7,3%, ce qui montre que l’inflation a bien un impact sur notre profession. »
C’est donc bien une crise profonde que traverse la profession en général et les infirmiers libéraux en particulier. Le moment est d’autant plus important, que la refonte de la profession devrait définir les grandes orientations pour la prochaine décennie.